mercredi 7 décembre 2005

l’Humanité: L’UMP vers la rupture finale avec le gaullisme - Article paru le 6 décembre 2005

Droite . Aujourd’hui, le bureau politique de l’UMP devrait entériner le principe de la désignation par les militants du candidat à l’élection présidentielle.

Le bureau politique de l’UMP examine ce soir le projet de réforme des statuts, qui rendra possibles des primaires pour la présidentielle de 2007. Point central de cette réforme : permettre aux militants de choisir eux-mêmes leur candidat à l’élection présidentielle. Une réforme à laquelle Nicolas Sarkozy est très attaché. Pas tant que le président de l’UMP veut faire de la démocratie interne une règle de fonctionnement absolue, mais parce qu’il estime que l’immense majorité des 193 000 adhérents de son parti sont acquis à sa cause. Le vote que le président de l’UMP entend mettre en oeuvre doit déterminer quel sera le candidat auquel l’UMP apportera son soutien mais qui selon Renaud Dutreil « n’interdit pas à un membre de l’UMP de se présenter, sans le soutien de l’Union, à l’élection présidentielle ». Mais sans soutien du parti, pas de moyens du parti. Un enjeu de taille puisque les moyens que le parti est susceptible de mettre à la disposition de son candidat sont considérables.

On comprend que les chiraquiens rejettent donc l’idée même de primaires. Leur argument « suprême » : l’esprit des institutions de la Ve République qui place la présidentielle au-dessus des partis. Dominique de Villepin, dauphin putatif de Jacques Chirac et espoir des anti-sarkozystes de droite, l’a réaffirmé lors de sa conférence de presse mensuelle : « Compte tenu de mon engagement et de ma conviction gaullistes, l’élection présidentielle c’est la rencontre entre un homme et un peuple. Je souhaite que cette rencontre soit préservée en ce qui concerne ma famille politique. » Un argument qui peine à convaincre tant l’héritage gaulliste n’est plus qu’un lointain souvenir chez les militants UMP les plus anciens (voir encadré). Quant aux nouveaux adhérents, ils ont rejoint le parti majoritaire sur la base d’un soutien à Nicolas Sarkozy. Fort de cette situation, le président de l’UMP en fait des tonnes en expliquant à ses troupes : « Qui peut penser qu’en 2005 on puisse décider qui vous aurez à l’élection suprême sans vous demander votre avis. À l’UMP, il n’y a pas de petits groupes où on se réunit pour décider dans votre dos. Il n’y a pas d’arrangements entre trop bons amis. » Et pour faire bon poids, il ajoute « ce n’est pas à Jacques Chirac de se mêler du fonctionnement de l’UMP ». Si la réforme des statuts est validée elle sera entérinée par un congrès extraordinaire via Internet dans la deuxième quinzaine de janvier 2006. Un an plus tard, en janvier 2007, les adhérents à jour de cotisation au 31 décembre 2006 auront droit à un vrai congrès pour choisir leur champion.

Nicolas sarkozy

à la manoeuvre

En choisissant de précipiter les choses avec ce bureau politique, Nicolas Sarkozy a décidé de placer le clan chiraquien dans une situation des plus inconfortables. Fort de sa popularité, le ministre de l’Intérieur tente d’imposer au chef de l’État un mode de désignation qui, si ce dernier l’accepte, implique non seulement qu’il ne puisse imposer son dauphin, mais également qu’une hypothétique troisième candidature de sa part soit soumise au vote militant, avec le risque non négligeable d’être battu. Le rabaissant ainsi du statut de président de la République sortant à celui de simple prétendant UMP à l’Élysée. Un camouflet supplémentaire pour une fin de quinquennat qui pourrait être calamiteuse.

Stéphane Sahuc

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