mardi 10 avril 2007

Lettre à Ania, Mardi 10 Avril, Empire des Francs

Ma chère amie,
Que de long mois depuis ma dernière lettre.
Que de long mois à parcourir le pays, caché, terré pour éviter la milice.
J’ai passé tant d’heure à marcher de nuit et dormir le jour à l’abri d’un buisson ou dans un trou de terre que j’en avais oublié le plaisir de ressentir la caresse du soleil sur ma peau. Et puis chaque jour qui passait me rapprochait de toi mon aimée. Je n’ai de rêve que pour toi, je n’ai de pensées que vers toi. Alors l’espoir, l’espoir de te revoir me nourrissait de bonheur.
Et puis enfin, je l’ai aperçu, notre petit village de montagne. Perdu parmi les cimes et les sapins, enveloppé de brumes, qu’il est beau notre pays habillé de ses couleurs, de sa verdures, de sa fraîcheur et de son air chargé de l’odeur de la terre encore humide la dernière pluie. Je dois le reconnaître, j’ai pleuré lorsque mes yeux se sont posé sur ces maisons qui habillent mes souvenirs d’enfance. Je n’ai pas pris beaucoup de précaution en me rapprochant, le sourire aux lèvres. Mais à mesure que je m’approchais, mon sourire devint plus hésitant, moins francs… Avant de sombrer dans la détresse.
Personne. Je ne vis personne dans les rues à quelques distances. Pas âme qui vive. Dans notre petit village. Après des mois à fuir et à me cacher, l’espoir de retrouver mon pays avait occulté toutes autres pensées, alors je fus pris de tremblement et de peur. Quel étrange spectacle j’ai du donné aux rares oiseaux qui nichaient sous les toits. Courant comme un fou dans ces rues dessertes. Plus je m’enfonçais entre les maisons, plus j’avais peur. Des vitres brisées, des volets tombants, de la poussières et des mauvaises herbes partout. Cela faisait manifestement des mois que le village était abandonné.
Je finis par arrivé devant chez toi, passant devant la maison vide de mes parents. Comme toutes les autres, ta maison était abandonnée, laissée au vent et au temps. Je rentrais à l’intérieur par la porte qui n’était pas fermée… Fracturée même. Je hurlais ton nom, criant au bout du compte comme un enfant désespéré… Avant de m’effondrer sur le plancher ancien, secoué de sanglots désespérés. Tous mes espoirs envolés, tu avais disparue et mon avenir avec.
Cet alors que je fus tiré de ma détresse par une main sur mon épaule. Je me retournais pour tomber sur le visage buriné d’une vieille femme. Son visage était triste et la souffrance de ses yeux vain me faire honte de moi même m’être laissé à pareil désespoir. Je la scrutais quelques secondes avant finir par reconnaître la vieille Odile. Elle raconta alors, elle me raconta comment la milice était venu ici un soir de décembre, avait enfoncé chaque porte et réuni tous le monde sur la place du marché. Tous le monde, femmes ou enfants, avait été enchaîné à son voisin et forcé à quitter le village dans le froid glaciale et la nuit à pied, descendant vers la vallée. Elle y avait échappée par miracle et depuis elle n’avait jamais revu personne. Je pleurais la disparition de mes parents et la tienne plus encore.
Et enfin l’espoir, quand je la questionnais sur ton devenir, m’attendant au pire, elle m’appris que toi et ta famille étiez déjà partis, fin novembre, pour vous rendre chez un cousin éloigné. L’espoir a jaillit de ses cendres. C’est pourquoi je t’écris cette lettre, cette lettre que je ne peux pas poster car je n’ai pas ton adresse. Ce que j’espère, c’est te la remettre en mains propres.
Je suis repartis sur les routes sur la seule foi des paroles d’une vieille dame qui n’a rien voulu entendre quand je lui ai demandé de me suivre jusqu’au prochain village. Elle n’a pas voulu, elle voulait mourir ici m’a-t-elle dit. Et depuis je marche. J’espère, je rêve. Tant qu’il me reste une chance de te revoir je continu de vivre pour cet instant. Je n’abandonnerais jamais, je ne le veux pas, je ne le peux pas. Revoir tes yeux est mon seul désir. Mon seul réconfort. Tu es désormais ma seule famille, ma vie et mon existence.

J’attends cet instant où je te reverrais, où je te serrerais dans mes bras, où je plongerais mes yeux dans les tiens. Pour toi je vis. Par toi j’espère.

Ton ami.

Alexis.

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